Le chevalier errant, L'épée lige, George R.R. Martin.

Publié le par Kulturopat

couv le chevalier errant

L'été brûle davantage les terres du Westeros à mesure que le lecteur avance dans le récit. L'atmosphère y est irrespirable. «Il fait trop chaud pour parler. Il fait trop chaud pour chevaucher. Il y a juste qu'il fait foutrement trop chaud. » Même les mouches se sont volatisées ! À croire qu'elles ont plus de jugeote qu'un Lannister, un Barathéon et un Tyrel réunis. Et c'est au grand bénéfice de Dunk, chevalier depuis peu, qui, sans hâte, enterre son ancien maître, Ser Arlan de Pennytree. Quoi de plus funeste, quand on y pense, que le sort d'un chevalier errant ? D'être enseveli dare-dare au bord d'un chemin, après s'être fait dépouillé de ses armes, en ferait réfléchir plus d'uns, m'est avis. Sauf ceux dont les actes sont, selon eux, dictés par le destin, forcément. Ou la fatalité, pour d'autres. Mais pour Dunk, il devient urgent de trouver de la monnaie. Et là, pas question de se laisser guider par une main divine, « il y a un tournoi à Sorbier ».

En route, il rencontrera l'Œuf, son futur écuyer. A-t-on idée de s'affubler d'un nom pareil ? Assurément. L'Œuf, le diminutif d'Aegon (egg, en anglais), Aegon Targaryen... Le futur Aegon V Targaryen, dit Aegon l'Invraisemblable, en raison d'avoir défié toutes probabilités de monter sur le Trône de fer - il est le quatrième fils d'un quatrième fils. Le troisième étant Aemon, le mestre de Châteaunoir, celui même qui refusera de monter sur le trône lorsque Meakar Targaryen (leur père) mourra. Mais là est une autre histoire. Pour l'heure, le temps n'est pas à l'hivers. Et comme George R.R. Martin se plait à historiciser le contexte dans lequel évoluent les personnages de ses romans, le lecteur se trouve plongé dans un passé houleux dont les conséquences se traduisent dans le présent romanesque. Meakar n'est pas encore Roi des Sept couronnes. Mais il aurait dû être sa Main. Or, Aerys I Targaryen nomme Freuxsanglant, un lord qui n'en est pas un. Un roturier. Alors, Meakar a quitté le Conseil pour bouder d'autant plus dans un coin de sa résidence personnelle que le roi s'entourait de mestres, de septons et de baladins au détriment de la gestion des Sept couronnes. Véritablement, c'est le gueux qui règne ! (Sent la baston, déjà). Mais pourquoi diable est-ce Dearon qui monta sur le trône ? Question qui ne restera pas sans réponse. L'auteur ayant pris la fâcheuse habitude de construire son univers façon puzzle, le lecteur apprendra pourquoi la maison Osgris ne règne plus en maître de Nonnains, à l'est, à Toits-de-Lauzes (...) Froides-Douve était à [eux], ainsi que monts Fer-à-cheval, les grottes des Bas-Derring, les villages de Dosk, de Petit-Dosk et de fond-de-Gnôle... Ce n'est donc pas une Araignée, une quatre fois veuve qui détournera la rivière Échiquetée - emblème de la maison Osgris d'ailleurs ! Aussi, ser Eustace voit en Dunk, son homme lige depuis peu, le moyen de reprendre son bien. Non mais ! A-t-on déjà vu un dragon tricéphale de sable sur gueule régner ?

Un roman qui se lit d'un trait (malheureusement) tant il est captivant. La fantasy en filigrane, l'héraldique en vigueur et l'intrigue politique comme ascenseur social. Du grand art romanesque.

 

Publié dans bOukine Rit

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